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Les pharmacies des hôpitaux peuvent supporter de nouvelles économies !

11/03/2020

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On entend

Les pharmacies des hôpitaux dégagent des marges. Leur imposer des économies supplémentaires ne pose donc aucun problème.
 
Vraiment ?
Il ne faut pas confondre « marges » et « marges disponibles » !  Les marges des officines hospitalières permettent aux hôpitaux de pallier, en partie, leur manque de financement.

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image : Visual Hunt
 
UNESSA décrypte

Ce jeudi 12 mars passera à la Chambre, un projet de loi de la ministre de la Santé publique portant sur des économies dans le médicament. À juste titre, la ministre de la Santé publique, Maggie De Block, a été mise sous pression pour faire contribuer davantage l’industrie pharmaceutique aux économies imposées dans les soins de santé. On pouvait s’attendre à ce que son dernier projet de loi aille dans ce sens… Espoirs déçus. Parmi différentes mesures proposées, elle compte, une nouvelle fois, réduire le remboursement de certains médicaments aux officines hospitalières plutôt que d’imposer des réductions de prix de vente directement à l’industrie pharmaceutique. À charge des hôpitaux de négocier de nouveaux tarifs avec leurs fournisseurs. Pour ceux qui le peuvent ! Car les contrats en cours ne sont pas renégociables... Économie estimée de la mesure : 36 millions d’EUR sur 2020 et 48 millions d’EUR par an en vitesse de croisière. Autrement dit, 36 et 48 millions par an de moins pour les finances des hôpitaux…
 
Situation précaire
C’est une antienne, la santé financière des hôpitaux n’est globalement pas bonne. Les comptes d’un hôpital sur trois étaient dans le rouge en 2018 (étude MAHA 2019, Belfius). Pour rappel, l’ensemble des hôpitaux belges ont dégagé un résultat courant d’un peu moins de 32 millions d’EUR (soit une infime fraction de leur chiffre d’affaires). En outre, beaucoup d’hôpitaux dans le vert ont surtout été redevables au versement unique de montants de rattrapages en 2018. Dès lors, on peut affirmer sans trop se tromper qu’à situation comparable, amputer les comptes des hôpitaux de 48 millions (voire déjà de 36 millions), reviendra à faire plonger le résultat courant de l’ensemble du secteur hospitalier en négatif !
 
En clair, beaucoup plus d’hôpitaux seront en déficit et certains en déficit grave.
 
Pour boucler cette antienne, ajoutons que le secteur souffre d’un sous-financement chronique et que les traces de la cure d’économies forcées endurée ces dernières années ne sont pas encore effacées.
 
Officines sous-financées
Dans un registre plus technique, et peut-être moins connu, le financement des officines hospitalières (la sous-partie B5 du Budget des moyens financiers) est sous-évalué et ne couvre certainement pas le surcroît d’activités lié au développement de l’hospitalisation de jour ou les « nouvelles » missions dévolues aux hôpitaux en matière de médicaments : chasse aux falsifications, sécurisation de la distribution aux patients… Pour justifiées qu’elles soient, ces missions ont été imposées aux hôpitaux, mais sans moyens financiers complémentaires pour les mener.   
 
Marges indisponibles !
Dans ce contexte, on comprendra aisément que les marges dégagées par les pharmacies des hôpitaux sont autant de poires pour la soif permettant de limiter les dégâts dans les comptes de résultats. Les marges des officines hospitalières ne sont donc pas des marges disponibles.
 
La ministre De Block considère-t-elle les hôpitaux belges comme de simples variables d’ajustement budgétaire ? On serait tenté de le croire… Madame De Block, les caisses des hôpitaux ne sont pas des coffres au trésor. Ce que vous y puisez se répercute directement ou indirectement sur les investissements réalisés et, in fine, sur les patients ainsi que la qualité de leurs soins.
 
UNESSA estime :
  • que le projet de loi de la ministre De Block est une nouvelle mesure d’économie dirigée contre les hôpitaux. Or, le secteur a déjà été très clair : toute nouvelle mesure d’économie budgétaire aura des implications sur les soins.
 
UNESSA demande :

  • qu’une alternative à l’actuel projet de loi soit étudiée, en concertation avec l’ensemble du secteur des soins de santé ;
  • que si elle se justifiait, toute mesure allant dans le sens d’une économie sur les médicaments ait un impact neutre sur les finances des hôpitaux ;
  • qu’une évaluation annuelle de cette mesure soit réalisée ; .
  • un refinancement de la sous-partie B5 du Budget des moyens financiers, en adéquation avec les activités réelles et les missions demandées aux officines hospitalières.
 
UNESSA continue de plaider en faveur d’un cadre budgétaire stable, pluriannuel et prévisible pour les finances des hôpitaux.


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