On entend
«… Les suppléments d’honoraires sont une source de profit pour les hôpitaux.»
Vraiment ?
S’agit-il d’un moyen facile de se faire de l’argent sur le dos des patients ? Ou juste un moyen d’équilibrer les comptes, mis à mal par ailleurs ?
UNESSA décrypte
Début décembre, la Mutualité Chrétienne a publié son 13
e baromètre hospitalier. Solidaris avait fait de même quelques semaines auparavant. Différentes recommandations sont tirées de ces études. Pour UNESSA, la question des suppléments d’honoraires doit s’envisager dans sa globalité.
Plusieurs sous-financements caractérisent le secteur hospitalier. L’Etat n’honore pas, ou parfois avec plusieurs années de retard, ses dettes vis-à-vis du secteur
[1].
Pour UNESSA, si l’on souhaite réformer le système des suppléments d’honoraires, il faut approcher
simultanément l’ensemble de la problématique du financement hospitalier. Quant à la forme, il est nécessaire,
dès le départ, d’impliquer tous les acteurs concernés. Une politique de changement ne doit pas s’imposer, elle doit se discuter et se négocier. Il est également important de nuancer certains messages.
Une vision nuancée de la réalité communiquée
Un premier constat peut être tiré du graphique ci-dessous. Le coût d’une hospitalisation en chambre double, c’est-à-dire pour plus de 80 % de la population, est en constante diminution depuis plus de 10 ans. En moyenne, nous en sommes à moins de 300 € par séjour. Ceci n’est pas mis en avant par les organismes assureurs et n’est pas relayé.
Un second constat concerne la facture en chambre individuelle qui avoisine en moyenne 1.500 € à charge du patient. Nous devons cependant observer une stagnation de ces coûts ces dernières années.
Ces deux montants sont à charge du patient mais pas forcément supportés par les patients.
Source : 13ème baromètre hospitalier de la MC – Dossier de presse, p. 30.
Que ce soit en chambre à 2 lits ou en chambre individuelle, de nombreux assureurs, mutuellistes ou privés, prennent à leur charge tout ou partie de ces coûts. Il s’agissait alors de reconnaître que les « suppléments d’honoraires » font partie intégrante du système et que, tout comme d’autres « risques » assurés, ils étaient pris en charge moyennant le paiement d’une prime pour le patient.
Le système arrive-t-il à une limite dans le chef des assureurs ? Peut-être… mais on ne peut pas le balayer d’un revers de main, sans tenir compte de la réalité hospitalière qui s’inscrit en filigrane.
Les recommandations des organismes assureurs à l’égard des patients sont importantes. Notre système de santé est fondé sur le principe du libre-choix
[2].
Le graphe ci-dessous traduit la politique de choix des patients. Les patients demandent légitimement de plus en plus souvent à séjourner dans une chambre particulière, mais dans une proportion qui reste relativement faible en regard des séjours en chambre à deux lits.
Source : 13ème baromètre hospitalier de la MC – Dossier de presse, p. 28.
Au-delà d’une approche par les coûts, largement développée dans les baromètres hospitaliers récemment publiés, une étude des volumes serait intéressante. Elle traduirait sans doute davantage la volonté exprimée par les patients assurés de séjourner dans une chambre particulière.
Dans un tableau publié par Solidaris
[3] dans son dernier baromètre, nous constatons que la proportion de séjours en chambre particulière reste constante entre 2012 et 2016 (16%). Rappelons-nous qu’au niveau santé publique, nous voyons l’espérance de vie augmenter d’un an tous les 5 ans. Au niveau des volumes, et eu égard au nombre de séjours hospitaliers qui augmente chaque année, nous ne pouvons pas dire qu’il y a un « dérapage » et que nous sommes dans un « tout à la chambre particulière ». Bien au contraire.
En conclusion :
- Pour 80% de la population, les suppléments d’honoraires diminuent depuis de nombreuses années.
- Pour les patients qui souhaitent une chambre particulière, il y a aussi une stagnation de leurs suppléments qui sont essentiellement pris en charge par leurs assurances (84%
[4]).
- Il n’y a donc pas de problème de limitation de l’accessibilité aux soins hospitaliers.
UNESSA estime donc que le dossier des suppléments d’honoraires ne doit pas être pris isolément. Il s’agit d’un dossier de fond indissociable du financement des hôpitaux.
UNESSA se veut être un acteur constructif dans le débat à mener. Mais souhaite que celui-ci s’inscrive dans une réelle démarche de concertation, qui puisse aller au fond des choses, par-delà les slogans partiels et sans nuances.
Pour garantir la pérennité de notre système de santé, de qualité, UNESSA plaide pour qu’en 2018 chaque acteur prenne ses responsabilités.
Les gestionnaires hospitaliers ont besoin d’un cadre stable et prévisible. Ils ont besoin de garanties, dans un contexte où les couches d’incertitudes ne cessent de se superposer.
[2] Depuis la grève des médecins de 1964, et les accords de la Saint-Jean qui ont suivis, les principes de la médecine libérale sont confirmés (libre choix du médecin par le patient, liberté diagnostique et thérapeutique).
[3] Baromètre hospitalier 2016 de Solidaris , p. 4.